Rares sont les témoignages des personnes ayant fui la Corée du Nord après avoir survécu à un camp de travail forcé. So-young raconte son terrible parcours.
So-young (pseudonyme) vit maintenant en Corée du Sud. Mariée à un Coréen de Chine, elle a un fils de 21 ans. Elle raconte son incroyable périple.
«J’ai grandi en Corée du Nord, près de la frontière chinoise, dans une famille plutôt heureuse avec mes parents et deux frères plus jeunes, qui vivent toujours en Corée du Nord. À 18 ans, je rêvais de devenir une des meilleures basketteuses de l’armée. Mais j’ai su que ce serait impossible car je connaissais quelqu’un qui avait fui le pays et de ce fait, je n'étais pas considérée comme une bonne citoyenne.»
La famine qui a commencé au milieu des années 90 a été une raison de plus pour So-young d’émigrer en Chine.
«Des gens mouraient tous les jours. Dans ma région, on était même à court de cercueils.»
Ainsi, lorsque sa cousine chinoise lui a proposé de fuir en Chine, elle n'a pas hésité. À l'époque, il était plus facile de traverser le fleuve qui marque la frontière entre les deux pays. C’est là qu'elle a rencontré son mari.
De l’église au tribunal
«En Chine, nous habitions en face d’une église. J’y suis allée par curiosité. On m’a invitée à une réunion de femmes. L’église m’a réconfortée et je m’y suis sentie en sécurité. J’ai beaucoup aimé ces réunions. Un jour, je m’y suis rendue comme d’habitude, sans me douter que la police nous y attendait.»
So-young a été interrogée au poste de police voisin. Après une semaine dans une prison chinoise, on l’a renvoyée en Corée du Nord. Elle n’a jamais révélé qu’elle était mariée et qu’elle avait un bébé. Ni surtout qu’elle était allée à l’église: c’était une infraction grave.
«Après quelques mois en prison, on m’a amenée devant un juge. Il n’y avait pas d’avocat pour me défendre. Le juge a commencé à m’interroger : ''Pourquoi avez-vous trahi votre pays?'' J’ai répondu que j’avais besoin d’argent.» So-young est rapidement condamnée:
«L’audience a duré moins de 20 minutes, puis j’ai reçu la peine maximale: cinq ans de travaux forcés et de rééducation!»
En camp de travail
Moins de quatre mois après son arrestation, So-young a été envoyée dans un camp de travail dans le Nord: «À ma grande surprise, on m’a demandé quel genre de travail je voulais faire. J’ai dit que j’étais douée pour les travaux d’aiguilles. J’ai été placée dans un atelier de couture, avec un objectif hebdomadaire à atteindre», se souvient-elle.
Les détenues travaillaient et dormaient dans la même pièce, à même le sol, sans couvertures, par groupes de quinze. So-young poursuit: «Heureusement, ma famille a pu m’aider. Tous les trois mois, ma mère m’apportait des sacs de nourriture. Bien sûr, je devais partager ce que je recevais avec les gardes et les autres prisonnières, mais il m’en restait tout de même la moitié. Sans aide extérieure, il est vraiment difficile de survivre dans un camp de travail. Mon souvenir le plus vif est le stress d’atteindre l’objectif hebdomadaire. Si je n’y parvenais pas, c’était la punition. Autre difficulté: nous ne pouvions faire confiance à personne, car il y avait des espionnes parmi nous. Le plus choquant, c’est que j’ai dû, avec trois autres détenues, enterrer une femme décédée à 25 ans.»
Liberté retrouvée
So-young voulait absolument survivre. Devenue une prisonnière modèle, elle a été libérée au bout de deux ans et demi. Elle est restée dans sa famille en Corée du Nord pendant encore deux ans et demi avant fuir en Chine. Réfugiée chez une personne de sa parenté, elle a appelé son mari.
«Nous avons pris la décision de nous rendre en Corée du Sud. Mon mari est parti le premier pour gagner de l’argent. Il fallait faire le voyage à pied, illégalement, sur des routes de montagne dangereuses et à travers la jungle du Vietnam, du Laos et de la Thaïlande. Mais j’étais têtue. J’ai payé un passeur et, avec deux autres femmes, nous avons fui la Chine. Il nous a fallu presque un mois pour aller en Thaïlande. J’ai été recueillie dans un camp de réfugiés officiel et conduite en Corée du Sud un mois plus tard.»
Chaque année, Portes Ouvertes aide environ 200 femmes qui ont eu des parcours semblables à celui de So-young, financièrement et par des vêtements, des médicaments, des vivres, ainsi qu’un accompagnement spirituel et des études bibliques. Prions afin qu’elles trouvent Jésus et deviennent de futures responsables chrétiennes.